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null Les bactéries de la tuberculose d’origine animale s’avèrent plus virulentes que les souches humaines de la maladie

Une nouvelle étude menée à L'Institut met en lumière l'importance de l'approche « Une seule santé » dans la recherche sur la tuberculose

SOURCE : L'Institut
Le 29 octobre 2025

De nouveaux travaux de recherche, réalisés à L'Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGill (L'Institut) sous la direction de Sarah Danchuk, Ph. D., et de Marcel Behr, M.D., M. Sc. révèlent que, pour la première fois, des souches animales de la bactérie causant la tuberculose (TB) sont nettement plus virulentes que leurs homologues d'origine humaine. Publiés dans la revue PNAS, les résultats de cette étude contredisent une hypothèse de longue date, selon laquelle les bactéries du complexe Mycobacterium tuberculosis provoquent des infections comparables, quel que soit l'hôte. Ces données redéfinissent notre compréhension de l'évolution et de la pathogenèse de la tuberculose.

« Malgré le fait qu'elles ont en commun plus de 99,9 % de leur code génétique, les bactéries appartenant au complexe Mycobacterium tuberculosis ne se comportent pas toutes de la même manière lors d'une infection, a déclaré le Dr Behr, auteur principal de l'étude et scientifique senior au sein du Programme en maladies infectieuses et immunité en santé mondiale à L'Institut. Nos conclusions démontrent que les souches adaptées aux animaux peuvent causer une maladie beaucoup plus grave que ne le fait la souche d'origine humaine, ce qui souligne la nécessité d'adopter l'approche "Une seule santé" et d'étudier à la fois le pathogène et son hôte. »

Les auteurs principaux Marcel Behr (à gauche) et Sarah Danchuk (au centre) travaillent au sein du Programme en maladies infectieuses et immunité en santé mondiale à L’Institut. À droite, une capture d’écran de la réponse immunitaire à la bactérie Mycobacterium orygis – agent pathogène zoonotique – dans les poumons, réalisée en ayant recours à la cytométrie de masse à cellule unique.
Les auteurs principaux Marcel Behr (à gauche) et Sarah Danchuk (au centre) travaillent au sein du Programme en maladies infectieuses et immunité en santé mondiale à L’Institut. À droite, une capture d’écran de la réponse immunitaire à la bactérie Mycobacterium orygis – agent pathogène zoonotique – dans les poumons, réalisée en ayant recours à la cytométrie de masse à cellule unique.

Comparaison de l'infection entre les espèces

L'équipe a comparé trois bactéries étroitement liées : Mycobacterium tuberculosis (la principale cause de la TB humaine), Mycobacterium bovis (la cause « classique » de la TB bovine) et Mycobacterium orygis, pathogène multihôte récemment reconnu, qui se répand au sein du bétail et des animaux sauvages en Asie du Sud. Ayant recours à des veaux Holstein et à des souris C57BL/6, les chercheuses et les chercheurs ont observé des « hiérarchies de virulence » claires : Mycobacterium orygis et Mycobacterium bovis sont à l'origine de lésions pulmonaires et ganglionnaires importantes, alors que Mycobacterium tuberculosis provoquait une légère infection. Dans le modèle murin, les infections causées par des souches animales ont progressé beaucoup plus rapidement, en effet, une maladie grave s'est développée en quelques semaines, comparativement à une période de plusieurs mois pour la souche d'origine humaine.

« Nous avons l'habitude de croire que la bactérie Mycobacterium tuberculosis constitue le pathogène "le plus important" quand il est question de tuberculose, a poursuivi Sarah Danchuk, première auteure de l'étude et ancienne stagiaire au laboratoire du Dr Behr. Toutefois, nos résultats démontrent que les souches animales ne constituent pas des versions atténuées — elles se révèlent en fait plus virulentes chez leur hôte naturel et peuvent même l'être plus que Mycobacterium tuberculosis dans les modèles de laboratoire. »

Découverte des facteurs moléculaires

Bien que les trois bactéries partagent des génomes presque identiques, les chercheuses et les chercheurs ont relevé des différences clés dans l'expression de certaines protéines impliquées dans l'infection. Ces variations semblent influer sur la gravité de la maladie. Des expériences de suivi ont confirmé que certaines de ces protéines jouent un rôle critique dans le comportement agressif des souches animales. La prochaine étape consistera à évaluer les mécanismes moléculaires sous-jacents à ces caractéristiques et à déterminer leur pertinence, tant dans la tuberculose animale que dans la tuberculose humaine. Les travaux commentés ici pourraient révéler pourquoi des pathogènes aussi étroitement liés sont à l'origine de résultats aussi distincts relatifs à la maladie entre les espèces.

Il est intéressant de noter que l'infection ou la vaccination antérieure a changé la gravité de la maladie, démontrant ainsi que la mémoire immunitaire peut modifier les résultats de la maladie. Les souris qui avaient été immunisées avec le BCG (le seul vaccin homologué pour la tuberculose) ou ayant auparavant été exposées par voie orale à la bactérie Mycobacterium orygis ont survécu beaucoup plus longtemps lors de la réinfection. « La conclusion selon laquelle l'exposition orale a un effet protecteur a des ramifications importantes dans des environnements où la bactérie Mycobacterium orygis peut être présente dans le lait ou dans les produits laitiers », a ajouté le Dr Behr.

Ce projet ambitieux, d'une durée de cinq ans, a réuni des expertes et des experts issus de plusieurs domaines de la recherche sur la tuberculose, y compris des spécialistes venant de l'ensemble de l'Université McGill, de la Vaccine and Infectious Disease Organization ainsi que des partenaires internationaux, au Danemark et aux États-Unis. L'étude a bénéficié du soutien des Instituts de recherche en santé du Canada ainsi que sur l'expertise du personnel et les installations de deux plateformes technologiques de L'Institut : la Plateforme de confinement de niveau 3 (CN3) et la Plateforme de protéomique et analyse moléculaire.

« Ce projet nous a rappelé que la science suit rarement une trajectoire rectiligne, a conclu Sarah Danchuk. Chaque réponse suscitait de nouvelles questions — et c'est ce qui a rendu nos travaux si stimulants. C'est lorsqu'une équipe de scientifiques cherche à comprendre le "pourquoi" des choses que la découverte devient possible. »

À propos de l'étude

Les auteurs de l'article intitulé « Virulence hierarchies within the Mycobacterium tuberculosis complex » sont Sarah N. Danchuk, Shannon C. Duffy, Jaryd Sullivan, Syed Beenish Rufai, Fiona A. McIntosh, Andréanne Lupien, Luke B. Harrison, Hojjat Ghasemi Goojani, Lorne Taylor, Yuhong Wei, Philippe Joubert, Rasmus Mortensen, Jeffrey M. Chen, Nirajan Niroula, Robin Stevens, Carla Norleen, Vivek Kapur et Marcel A. Behr. Cet article a été publié dans PNAS le 16 octobre 2025, 122 (42) e2507104122.

Système DOI : https://doi.org/10.1073/pnas.2507104122

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